Les poutres à treillis métalliques sont des éléments structurels clés dans la construction industrielle, offrant une solution légère mais robuste pour les grandes portées. La conception et le calcul de ces structures nécessitent une connaissance approfondie des principes de la mécanique, des normes de construction et des logiciels de calcul assisté par ordinateur (CAO). Ce guide détaillé couvre les étapes essentielles du calcul structurel, du choix du matériau à la vérification des assemblages, afin d'assurer la sécurité et la performance à long terme de vos ouvrages.
Typologie des poutres à treillis métalliques
Le choix du type de poutre à treillis dépend des charges, de la portée et des contraintes spécifiques du projet. Voici quelques exemples de configurations courantes :
- Poutre à simple pente : Utilisée pour les toitures inclinées, elle est simple à concevoir et économique. La pente influence la répartition des charges.
- Poutre à double pente : Idéale pour les toitures symétriques, elle assure une meilleure répartition des charges et une plus grande stabilité.
- Poutre à nappes parallèles : Offre une grande rigidité et est particulièrement adaptée aux charges uniformément réparties, fréquentes dans les bâtiments industriels.
- Poutre Howe : Les barres de compression sont verticales et les barres de traction sont inclinées. Elle est simple à construire.
- Poutre Pratt : Les barres de compression sont inclinées et les barres de traction sont verticales. Elle est plus résistante que la poutre Howe.
- Poutre Warren : Elle est formée de triangles équilatéraux, offrant une grande résistance et une bonne répartition des charges.
Modélisation et hypothèses de calcul
La modélisation précise de la structure est essentielle pour un calcul fiable. Les logiciels de CAO tels que Robot Structural Analysis, SAP2000, ETABS, ou des logiciels open-source comme OpenSees, permettent une analyse par éléments finis (MEF).
Hypothèses simplificatrices et leurs limites
Le calcul structurel repose souvent sur des hypothèses simplificatrices, comme la linéarité élastique du matériau (acier), l'isotropie (propriétés mécaniques uniformes dans toutes les directions), et un comportement parfait des assemblages (boulons, soudures). Cependant, ces hypothèses peuvent être inadéquates pour des structures complexes ou soumises à de fortes charges. La prise en compte du fluage, des imperfections géométriques initiales, et des non-linéarités matérielles peut être nécessaire pour des analyses plus précises. Par exemple, une imperfection de 10 mm sur une poutre de 30 m peut influencer significativement le comportement de la structure sous charge.
Propriétés des matériaux
Les aciers de construction (S235, S275, S355 selon les Eurocodes) sont couramment utilisés. Leurs propriétés mécaniques (résistance à la traction, module d'Young, limite d'élasticité) doivent être précisément définies. La résistance à la traction de l'acier S275 est typiquement de 275 MPa. Le module d'Young, représentant la rigidité du matériau, est approximativement de 200 GPa pour l'acier. Ces valeurs sont cruciales pour le calcul des contraintes et des déformations.
Charges et actions
La détermination des charges est une étape essentielle. Il est crucial de considérer les charges permanentes et les charges variables.
Charges permanentes
Le poids propre de la poutre, calculé à partir de sa section et de la densité de l'acier (environ 7850 kg/m³), constitue une charge permanente. Les éléments fixés à la poutre (tôles, équipements, etc.) contribuent également à cette charge. Pour une poutre IPN 200 de 10m de long, le poids propre peut être estimé à 1000N. L’ajout de 500 kg d'équipement ajoute 4905N à la charge permanente totale.
Charges variables
Les charges variables sont plus imprévisibles. Il faut considérer :
- Charges de neige : Déterminées selon la zone climatique et la hauteur du bâtiment (ex: 1.5 kN/m²).
- Charges de vent : Calculées en fonction de la zone climatique, de la forme et de la hauteur de la structure (ex: 2 kN/m²).
- Charges sismiques : Déterminées en fonction de la zone sismique et des caractéristiques du bâtiment (ex: 0.2g).
- Charges d'exploitation : Charges dues aux équipements et aux personnes (ex: 5 kN/m²).
Combinaison des charges (eurocodes)
Les Eurocodes définissent les combinaisons de charges pour les états limites ultimes (ELU) et les états limites de service (ELS). Pour l’ELU, une combinaison fréquente est : 1.35 * (charges permanentes) + 1.5 * (charges variables dominantes). Pour l’ELS, une combinaison pourrait être : 1.0 * (charges permanentes) + 1.0 * (charges variables).
Méthodes de calcul
Plusieurs approches sont disponibles pour le calcul des efforts internes dans une poutre à treillis.
Méthode des nœuds
Cette méthode statique détermine les efforts dans chaque barre en analysant l'équilibre des forces à chaque nœud. Simple pour les structures petites, elle devient complexe pour des structures plus grandes. Pour une poutre simple, on peut utiliser l’équilibre des forces et des moments pour trouver les efforts dans chaque barre.
Méthode des sections
Cette méthode, basée sur l'équilibre des forces et des moments sur une section de la poutre, est utile pour déterminer les efforts dans des éléments spécifiques. On découpe la structure et on isole une partie pour réaliser l’équilibre statique.
Méthode des éléments finis (MEF)
La MEF est une méthode numérique précise pour les structures complexes. Elle divise la structure en éléments finis interconnectés, permettant de résoudre numériquement les équations de la mécanique des milieux continus. La précision dépend de la finesse du maillage. Plus le maillage est fin, plus le calcul est précis mais plus long.
Logiciels de calcul
Les logiciels de calcul par éléments finis automatisent le processus. Robot Structural Analysis, SAP2000, et ETABS sont des logiciels professionnels. OpenSees est un logiciel open-source, très performant pour les analyses non-linéaires.
Vérification et dimensionnement
Après le calcul des efforts, il est crucial de vérifier si les éléments de la poutre satisfont aux critères de résistance et de stabilité.
Vérification des contraintes
Les contraintes (traction, compression, cisaillement) dans chaque élément doivent rester en dessous des contraintes admissibles du matériau. La vérification du flambement (pour les éléments comprimés) et du voilement (pour les éléments minces) est essentielle. Une contrainte de 100 MPa dans un élément sollicité en traction avec une résistance admissible de 235 MPa est acceptable. Toutefois, si cette contrainte est proche de la limite, il faut envisager une augmentation de la section de l'élément.
Dimensionnement des éléments
Le choix de la section des éléments (tubes, profilés, etc.) dépend des contraintes et des conditions de stabilité. Des normes et des abaques spécifiques fournissent des informations sur les sections disponibles et leurs propriétés mécaniques. On choisira une section capable de supporter les efforts calculés en restant bien en dessous des contraintes admissibles.
Conception des assemblages
Les assemblages (boulonnés, soudés, rivés) doivent être dimensionnés pour transmettre les efforts entre les différents éléments de la poutre. Les normes de construction (Eurocodes) spécifient les règles de calcul pour chaque type d'assemblage. Pour un assemblage boulonné, il faut vérifier la résistance au cisaillement et à l'arrachement de chaque boulon. Pour un assemblage soudé, on vérifie la résistance de la soudure.
Tableau récapitulatif des aciers de construction
Acier | Résistance à la traction (MPa) | Limite d'élasticité (MPa) | Module d'Young (GPa) |
---|---|---|---|
S235 | 235 | 235 | 200 |
S275 | 275 | 275 | 200 |
S355 | 355 | 355 | 200 |
Ce guide fournit une introduction au calcul structurel des poutres à treillis métalliques. Il est essentiel de consulter les normes et les réglementations locales pour garantir la sécurité de vos constructions.